Interview avec Aurore Morisse, marchande d'art liégoise (27 avril 2025)
- Laurent Keysers
- 27 avr.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 12 août
Culture-Toi : Bonjour Aurore Morisse, présentez-nous votre parcours !
Aurore : Bonjour, je suis marchande d'art. La boutique est au Passage Lemonnier. On est au numéro 22, à côté de la Rotonde. Le Passage Lemonnier est un endroit très stratégique parce que ça a été le premier passage couvert, commercial de Belgique. Il a un côté très art déco. On le verra quand on lève les yeux. C'est ça qui est très beau. C'est un passage classé au patrimoine. Dans mon métier, ça a un sens. Mes parents étaient antiquaires donc j'ai grandi dans le beau et dans l'histoire dans la pérennisation et surtout le partage et partage de connaissances. Je me suis toujours dit je ne ferais jamais le métier de mes parents et puis finalement je suis un peu comme Obélix où on tombe le nez dans la casserole et puis un jour, on ne comprend pas comment et on a envie de promouvoir l'artisanat le beau et le qualitatif
Culture-Toi : Avez-vous vendu des objets insolites ces derniers temps ?
Aurore : Oui, des objets insolites j'en ai plein par leur histoire par leur utilisation. Il y a quelques jours j'ai vendu un coffret de trépanation napoléon 3 donc datant des années 1830. Il faut se dire qu’en 1830, on n'a pas tous les moyens techniques d'aujourd'hui et on va trépaner dans un cerveau avec des ustensiles qui font vraiment peur. C'était le petit côté insolite de cette dernière semaine.
Culture-Toi : Liège, une ville de patrimoine ?
Aurore : Oui, Liège est une ville qui a été numéro 1 mondiale en 1900. On a été en termes d'industrie, de recherche, de développement, vraiment avancé par rapport à d'autres villes et d'autres pays. On trouve des très beaux objets on trouve encore des collectionneurs. Dans nos fonds de caves dans nos greniers, des fois on peut trouver des pépites alors c'est vrai que Liège c'est une plaque tournante du beau on va trouver beaucoup d'objets qui vont être revendus à l'extérieur ou rachetés par des collectionneurs liégeois amateurs, des nantis. On n'a pas besoin d'avoir un statut social pour pouvoir acheter encore des jolis objets qui sont anciens ou contemporains parce qu'en fait je mélange les deux.
Culture-Toi : Vous avez été nommé citoyenne d’honneur de la ville de Liège.
Votre ressenti ?
Aurore : Je crois que j'ai été nommée citoyenne d'honneur pas pour les bonnes raisons, parce qu'on peut en fait faire des choses avec des initiatives qui sont citoyennes pour aider à développer, aider même les commerçants, développer le quartier en tant que citoyen tout court. Ce n'est pas parce qu'on passe à la télé qu'on fait les choses bien. Moi je pense qu'on peut faire ça dans l'ombre sans avoir de prix. C'est toujours flatteur d'avoir un prix de la ville de Liège. J'étais très touchée.
Culture-Toi : Une anecdote particulière et que diriez-vous à des jeunes qui s'intéressent à l'art ?
Aurore : On me dit souvent quand je croise des jeunes, « Ah, vous êtes antiquitaire ». Mais je dis, mais ce mot n'existe pas. C'est antiquaire. Et c'est vrai que je n'ai pas envie de dire que je suis antiquaire parce que c'est un mot qui est un petit peu désuet et surtout empoussiéré. Parce qu'on a l'impression, quand on rentre chez un antiquaire, on voit ce vieux bonhomme au fond de la boutique avec cette moustache, bedonnant, gros cigare, et qui limite quand vous entrez, vous fait sentir que vous n'êtes pas le bienvenu. Ici, c'est tout le contraire. Moi, je suis une femme, j'ai 34 ans. Et antiquaire, ce n'est pas des vieux objets qui puent, qui sont trop chers. En fait, antiquaire, marchand d'art, c'est des objets qu'on peut avoir chez soi. Ça passe du fauteuil knoll au Togo, qui sont abordables avec des chouettes tables, avec des très chouettes tableaux qui sont soit anciens, Soit on va avoir du contemporain où tout le monde peut s'acheter des choses. Et pour devenir marchand d'art, pas besoin de faire des études d'historien de l'art. Parce qu'en fait, quand on est historien de l'art, on sait relater des événements sur une ligne du temps. Mais ils ne savent pas forcément comment c'est fabriqué. Pour moi, être un vrai marchand d'art, il faut d'abord être faussaire pour comprendre les techniques d'authentification et savoir si cet objet est un vrai ou pas. Donc, marchand d'art, ça s'apprend d'abord sur le terrain.
Culture-Toi : Enfin, dernière question, quel aspect d’Affaire Conclue préférez-vous ?
Aurore : L'aspect de l'émission que je préfère, je pense que c'est la rencontre avec l'autre. Certains acheteurs sont devenus des amis aujourd'hui, proches. De pouvoir aussi rencontrer des personnes qui regardent la télé, qui adorent cette émission et qui ont la chance de venir sur le plateau. Il y a aussi ce coté de donner de l'espoir. J'ai un prisonnier de temps en temps qui m'appelle et qui me dit, Aurore je suis en prison et je vous regarde. Est-ce qu'on peut devenir amis? Je lui ai dit, devenir amis ça va être compliqué, mais je suis contente que ça puisse vous aider. D’autres personnes qui sont avec un moral un peu bas ou me disent « vous m'avez sauvé la vie ». Et en fait, ce sont des mots qui ont un gros poids, c'est hyper important. Et tout ça , parce qu'on était là dans leur télé au quotidien. Donc c'est ça la beauté. Il y a un côté très humain hyper important.
Merci Aurore pour cette interview !
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